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dimanche 26 août 2012

Bretagne, avant départ


Notre séjour s’achève. Demain retour à Paris. Aujourd'hui une belle journée semble s’annoncer, fraîche et lumineuse, ciel nettoyé après deux journées secouées par le vent et les averses violentes. J’écris un peu pendant que D. se prépare, puis balade à vélo au menu et cet après-midi dernière marche sur la plage et dernière baignade océane.

Je ne me suis pas toujours senti bien pendant ce séjour sans trop savoir pourquoi. Trop fréquemment un manque d’appétit à tout, un émoussement général de ma capacité d’enthousiasme. Il me fallait me secouer pour décider quoi faire de ma journée, choisir une activité ou une destination de promenade. Jamais les choses ne s’imposaient d’elle-même, dans la simplicité, dans la légèreté. Et je partais sans joie, sans conviction, comme blasé. Et il n’y a rien que je déteste plus que les gens blasés face à la beauté du monde !

J’ai eu l’impression d’être arrivé a quelquechose qui serait comme l’épuisement du lieu. On a passé ici le stade des découvertes. J’aime retrouver des lieux que j’ai connu, reparcourir des chemins, mais peut-être ici sommes nous venus trop souvent, trop régulièrement. Il faut harmonieusement mêler temps de ressourcement et d’imprégnation dans les lieux qui nous sont chers et temps d’exploration et de découverte d’autres qui nous sont inconnus.
La gêne physique a sans doute aussi eu sa part dans ce manque de tonus : le dos douloureux, une persistante raideur des membres et des articulations n’ont cessé de se rappeler à moi, les choses se sont peu à peu améliorée mais sans que je retrouve la souplesse et le délié tout à fait normal de mes gestes.
Et puis peut-être que les préoccupations liées à mon futur basculement vers la province ont joué aussi : j’ai l’impression d’avoir mille choses à faire à Paris pour préparer ce départ et du coup de me sentir ici comme en suspension.

Le manque d’énergie s’est appliqué à tout. Je voulais écrire. Je n’y suis guère parvenu. J’ai eu un mal fou à me mettre aux articles que je devais envoyer pour le prochain numéro de La Faute à Rousseau. Madame de Warens m’a spécialement donné du fil à retordre. Puis, quand j’ai été lancé, comme souvent c’est venu plus facilement et j’ai écrit très vite dans la foulée mes deux autres articles. Mais pourquoi cette difficulté à démarrer ? J’ai écrit quelques textes plus personnels aussi, autres que ces quelques pages de recension vacancière, des textes qui n’ont pas leur place ici mais je les ai écrit, non dans le plaisir, mais dans les doutes, les interrogations récurrentes.

La déconnexion forcée m’a aussi finalement pesée. J’ai été me connecter une ou deux fois dans un café et sur un trottoir au pied d’une maison amie dont les propriétaires nous ont donné le code de leur wifi, mais quel inconfort. J’ai juste regardé mes mails, envoyé deux trois courriers. Je ne me suis pas senti en état de suffisante disponibilité pour aller sur mon blog ou sur ceux des autres. La déconnexion totale ça peut être bien lorsqu’on totalement happé par autre chose, voyage lointain, randonnée itinérante, retraite choisie, mais pas dans une situation comme celle-ci.

Voilà, c’est mon impression générale. Bien sûr il y a eu des moments où je me suis senti bien, dans l’harmonie intérieure et dans le ravissement devant le lieu qui m’entourait. Une fois la machine lancée, toujours ça allait mieux. Fort heureusement je me laissais raviver par le simple mouvement de mon pas dans l’air vif, par le plaisir de l’eau fraîche autour de moi et de la nage revigorante, par la beauté environnante simplement qui est toujours différente bien sûr, malgré ce que j’ai dit de l’épuisement du lieu, car la mer, la lumière, la course des nuages ne sont jamais tout à fait les mêmes. Belles réflexions autour de ça dans le livre de Sylvain Tesson que je viens d’achever : Dans les forêts de Sibérie qui mériterait d’ailleurs une note ici que j’écrirais peut-être.

J’en étais là de ce billet. Et puis, « dring », non les téléphones ne font plus « dring » mais toujours est-il que c’était des amis séjournant dans la région et qui se proposait de venir nous voir. Du coup nous les accueillons demain et repoussons notre départ d’un jour. Beaucoup de choses à faire à Paris certes, mais ce n’est pas non plus à un jour près, il n’y a rien qui oblige comme c’était le cas du temps de la vie professionnelle, alors, oui, nous prenons ce temps, nous allons leur faire découvrir cet endroit où ils ne sont jamais venus, cela donne une autre dimension aussi de revoir en faisant découvrir, on ravive sa propre émotion esthétique et son amour d’un lieu à les partager.



 Comment ne pas s'ébaudir de cette beauté? (A la pointe de la Torche)

2 commentaires:

  1. "nous allons leur faire découvrir cet endroit où ils ne sont jamais venus, cela donne une autre dimension aussi de revoir en faisant découvrir, on ravive sa propre émotion esthétique et son amour d’un lieu à les partager."

    Oui, c'est ça, exactement ça. C'est ce que je ressens en faisant découvrir à d'autres des lieux que j'aime, que je connais comme ma poche, même un peu trop, leur faire découvrir ravive mon intérêt pour le lieu...

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