Pages

vendredi 29 juin 2012

Montagne


Me voici donc à la montagne, aux Contamines-Montjoie. De la terrasse du chalet que nous avons loué et sur laquelle, je me suis installé cet après-midi, tandis que les « autres » sont partis se promener, je jouis d’un moment de solitude, j’ai sorti mon ordinateur et prend plaisir à venir ici poser ces mots, je laisse mon regard se promener, le clavier et l’écran, la pelouse devant moi, en contrebas l’équipe de jardiniers venus d’Italie qui « paysage » non sans de sonores interjections le terrain d’un chalet voisin, ou bien, si je lève le nez, quinze cent mètres au-dessus de moi, la calotte imposante des Dômes de Miage…

Je connais bien cette vallée. J’y suis venu enfant car ma mère y avait sa plus grande amie d’enfance chez qui nous venions assez souvent passer des vacances. Puis j’y suis revenu adulte, les grands parents de ma femme y avaient un chalet où nous avons séjourné à de nombreuses reprises, tant l’été que l’hiver, seuls ou avec nos enfants et au milieu d’une cousinade multiple. Après la mort des grands-parents, il y a une quinzaine d’années, le chalet a dû être vendu et nous n’étions pas revenus dans la région. Nous sentions bien qu’un séjour ici ferait un immense plaisir à la mère de ma femme qui elle avait fréquenté cette vallée, depuis sa plus tendre enfance, depuis le moment où son père avait fait construire le chalet en 1935. On a donc décidé de cette location et du coup on a aussi invité mon propre père à se joindre à nous.

Le temps est beau et nous avons randonné presque tous les jours depuis notre arrivée, d’autant que nous avons été rejoints par des amis très marcheurs. Nous nous organisons pour trouver des parcours permettant que chacun puisse avoir son content d’heures de marche et de dénivelée puis qu’on se retrouve ensuite quelquepart sur les pentes. Que les portables sont pratiques pour ça ! Hier nos amis sont montés au sommet du Mont-Joly, moi j’ai amené mon père à mi-pente (six cent mètres de dénivelée quand même, à quelques jours de ses 87 ans, je l’admire !), ma femme a marché avec sa mère un peu moins haut et nous nous sommes tous retrouvés à l’ombre d’un chalet, face au Mont-Blanc avant de terminer la descente ensemble, calé sur le pas le plus lent. Il y a quelque chose qui me touche infiniment plus dans ses simples activités partagées que dans n’importe quelle « réunion de famille » organisée de façon plus ou moins obligatoire à l’occasion de tel ou tel évènement du calendrier.

La marche, l’aération de l’esprit, me font mettre à bonne distance toutes les petites interrogations et anxiétés que j’ai pu avoir au moment de mon départ de Paris. A vrai dire je me fous des expos que je rate et des films qui me passent sous le nez. D’ailleurs je ne sais même pas ce que je rate et ne m’en préoccupe pas. Guère plus de la vie du monde d’ailleurs ! Je parcours mon journal (tout de même je l’ai fait suivre !) mais je lis tout ça d’un peu haut, c’est le cas de le dire. Je suis resté sans connexion plusieurs jours, là ça y est, j’ai rebranché, du coup je publie en même temps que celui-ci un billet écrit pour l’essentiel la veille du départ de Paris, mais que je n’avais pas eu le temps de peaufiner et de mettre en ligne dans la bousculade du départ.

Les dômes de Miage, au dessus de ma tête pendant que j'écris

jeudi 21 juin 2012

Sur le départ


On part tout à l’heure en voyage, une sorte de tour de France, avec séjour au pied du Mont-Blanc, puis dans la région toulousaine et enfin en Bretagne. Au total on part de Paris, sans y revenir pour plus de deux mois ce qui ne nous était bien sûr jamais arrivé, activités professionnelle obligent.
Cet éloignement de nos bases pendant aussi longtemps m’occasionne au moment de partir quelques tournoiements de préoccupations. Sans parler des vêtements et équipements variés qu’il faut prendre compte tenu des activités bien différentes que nous allons pratiquer dans ces divers lieux, il me faut penser aussi à tout ce que je prévois de faire pendant cette période en dehors des activités dites de « vacances », penser à ne rien oublier des divers documents, livres, dossiers nécessaires.

Ces derniers jours j’ai pratiqué du « culturel » à haute dose. Il y avait diverses expositions qui seront terminées à mon retour, des films qui sortent et dont je sais bien qu’ils ne seront plus visibles lorsque je reviendrai. Certains forcément m’échapperont. Au moins ai-je vu ces tous derniers jours l’intéressante exposition Les Maîtres du désordre au Musée Branly, Degas et le nu ainsi que Misia, au musée d’Orsay. Au cinéma, je me suis précipité sur Voyage en France, passionnant retour sur le parcours de Raymond Depardon et sur The Deep blue sea, vu le jour même de sa sortie : un très bon film, l’histoire assez mélo d’une femme par trop prise d’un amour mal partagé dans l’Angleterre corsetée de l’immédiat après-guerre. Le film est très prenant, excellemment interprété, notamment par Raquel Weitz, il est tout entier empreint d’un halo de douce et poétique nostalgie, obtenu par le jeu habile de l’alternance passé-présent, rêve et réalité, par la texture même des images et de la bande-son et spécialement des chansons, très évocatrices d’un temps et d’une ambiance. (Le « traitement » cinématographique m’a fait penser à Won-Kar-Wai, un autre cinéaste par lequel je me laisse facilement embarquer).

Ce vague petit vertige d’avant départ me renvoie aussi à ma perspective d’installation dans notre maison du sud-ouest. Ce déménagement devrait se concrétiser fin octobre, début novembre. Ce n’est pas un départ radical, je reviendrai souvent à Paris, nous gardons une pièce dans notre appartement parisien où un de mes fils va s’installer en colocation avec des copains. Simplement nous basculons le centre de gravité de notre vie là-bas. J’ai très envie de ce changement, être dans une petite ville mais pas loin d’une grande, m’inscrire dans des convivialités de plus grande proximité, pouvoir occuper notre grande et belle maison dont on a achevé la rénovation, avoir de l’espace, un vrai jardin, pouvoir se retrouver dans la campagne en quelques coups de pédale. Mais, pour la première fois, à voir comment avant ce départ de Paris pour une période prolongée, je me suis senti frustré par avance de certaines expos ou films que je n’aurai pas le temps de voir, j’ai eu un petit pincement, une petite angoisse : est-ce que certaines choses ne vont pas me manquer ?  Mais tout choix est aussi forcément renonciation n’est-ce-pas…

jeudi 14 juin 2012

Avec Rousseau


J’ai boosté mes envies Rousseau à l’occasion des récentes journées de l’APA à Genève. Depuis je continue à naviguer autour de Jean-Jacques. J’ai acheté et lu le hors série du Monde, assez riche d’analyses, de jugements et d’extraits. J’ai acheté une biographie de Madame de Warens qui est tout en haut de ma Pile à Lire et que je vais emporter avec moi pendant les vacances. Surtout je me suis plongé dans La Nouvelle Héloïse.
Je me disais que ce serait pour voir, que certainement je papillonnerai et zapperai, juste suffisamment pour me pénétrer un peu du ton et de l’ambiance. Après un démarrage en effet de la sorte, je me suis pris maintenant à une lecture continue et régulière, j’en suis au milieu du second livre et ne ressens nulle lassitude.
On se laisse prendre au charme de ces amours passionnées et romantiques, à la vivacité et à la beauté de la langue du 18°, à ce que le texte nous dit de la psychologie de Jean-Jacques, à la richesse aussi (ce à quoi je m’attendais moins) des aperçus sur la société et les débats de l’époque. J’aime aussi voir à quel point la figure de Julie est centrale, que c’est elle qui, le plus souvent, est à l’initiative. On comprend qu’elle ait fascinée et servi de modèle à bien des femmes du temps. Qu’il ait créé un tel personnage contribue à donner au discours de Rousseau sur les femmes une image singulièrement plus complexe que celle qui serait tirée uniquement des propos misogynes du 5° Livre de l’Emile.
Du coup cette Nouvelle Héloïse est devenu mon livre de chevet du moment, celui qui berce mes endormissements. (Je lis toujours plusieurs livres à la fois, les lectures pragmatiques pour des articles ou travaux en cours, lues plutôt à mon bureau, à portée de plume, les livres courts et rapides pour les transports et déplacements avec en plus depuis peu, les ressources d’une liseuse, et puis les gros pavés, les livres au long cours qui donnent le temps de pénétrer vraiment dans des mondes éloignés, qui font voyager dans le temps et dans l’espace, qui permettent qu’on s’échappe, lectures du pur plaisir, du cocooning et du vacillement entre la veille et le sommeil. C’est donc Rousseau qui est en ce moment commis à cet office, j’ai mis de côté pour l’instant la Chine et Le Rêve dans le pavillon rouge.)
Pendant mes études d’histoire, entre autres projet, j’ai eu un temps celui de me spécialiser sur le 18°. Mon intérêt et ma tendresse pour ce siècle ne m’ont jamais tout à fait quitté, ce n’est pas un hasard si je me régale des aventures du commissaire Le Floch et que dans mes projets aussi, surtout depuis la magnifique exposition à la BNF, vue deux fois, il y a l’envie de me plonger dans cet autre pavé, L’histoire de ma vie de Casanova...

mardi 12 juin 2012

Ecrire?


Hier je suis allé au cinéma pour voir Une seconde Femme.
Pendant les publicités la projection s’interrompt brutalement. Les lumières se rallument. Du temps passe. Mouvements divers dans la salle. Certains vont aux nouvelles, reviennent, il parait qu’il faut attendre. Le temps s’étire…
Je prends mon carnet dans ma besace. Je commence à écrire des phrases. Un incipit. Celui d’un récit autobiographico-fictionnel (je ne dis pas une autofiction !) dont j’ai la ligne directrice en tête depuis plusieurs années, le titre aussi depuis un peu moins longtemps, dont je sais de façon plus récente, après avoir longtemps pensé à un récit en je, que ce sera un récit en il, c’est à peu près tout, à part ça, je n’en avais pas écrit un traitre mot !
Un responsable de la salle vient nous annoncer que la séance n’aura pas lieu. Gros problème électrique et même amorce d’incendie tout de suite maîtrisé dans la cabine de projection. Ah, là, là, en plus, l’écrivain en herbe a failli griller ! Je range mon carnet. C’est remboursement ou autre film dans le multiplexe. Le Grand Soir commençait cinq minutes après. J’ai été le voir et j’en suis resté là de mes écritures.
Mais en rentrant chez moi, j’ai immédiatement saisi ces premiers mots dans un fichier informatique. Pas grand-chose, cinq lignes, mais voilà c’est un début, le fichier est ouvert. Ce n’est pas le feu sacré. Je ne me suis pas lancé dans la foulée. J’ai d’ailleurs deux petites nouvelles en stand by que du coup j’ai envie de terminer d’abord. Mais c’est étrange ce surgissement alors que je n’y pensais pas. Est-ce que d’avoir recommencé à chatouiller le clavier, pas seulement pour des articles de commande mais pour cet espace plus personnel, pour ce blog, a remis souterrainement des choses en marche ? Peut-être.
Eh, eh, qui sait, peut-être que d’ici que je sois centenaire, ce récit sera sorti des limbes !

(A part ça, Le Grand Soir, pas mal du tout, acide à souhait, souvent drôle mais assez désespéré, parfois un peu lourd quand même, et puis Une seconde Femme que finalement j’ai pu voir aujourd'hui, très dur mais très bon, je vous le recommande).

dimanche 10 juin 2012

Emotion esthétique


J’ai été voir hier l’exposition sur la Sainte-Anne de Léonard de Vinci au Louvre.
Je vois pas mal d’expos, comme je vois pas mal de films. Au point de me dire parfois que je suis un peu trop dans la consommation culturelle. Maintenant que je dispose de plus de temps, presqu’à chaque jour son activité. Je feuillette mon officiel, note ce qu’il y à voir, calcule quand je vais y aller. Ce que je vois me plaît plus ou moins forcément mais j’y trouve à chaque fois de l’intérêt, j’y ai chaque fois du plaisir. Mais pas forcément de l’émotion. Pas forcément cette impression que quelque chose vibre au profond de soi, une évidence de beauté, qui saisit véritablement, emporte, fait qu’on n’est plus simplement un regard extérieur et distant mais qu’on est soi-même porté par cette beauté.

A quoi cela tient-il ?
Évidemment à la beauté intrinsèque de l’œuvre en premier lieu. On connaissait cette Sainte-Anne bien sûr mais la restauration dont elle vient de bénéficier la magnifie somptueusement, faisant ressortir la force de la composition, la précision des modelés, l’infinie tendresse et douceur mais aussi l’impalpable mélancolie qui se dégage des attitudes et des regards des personnages, la beauté des coloris qui parviennent à être, c’est ce qui est quasi magique, à la fois extraordinairement éclatants et d’une très grande douceur. Il est certain qu’il n’y a pas photo (si j’ose dire) quand on compare avec les diverses autres versions ou copies par les ateliers ou collaborateur, aussi belles et talentueuses soient-elles.
Mais le choc est favorisé aussi je crois par le parcours de l’exposition. Toutes les pièces que l’on voit avant, autres œuvres sur la thématique de la Sainte-Anne trinitaire, documents préparatoires, textes, dessins, versions de collaborateurs, constituent comme une sorte de parcours initiatique qui mettent en condition, accroissent notre réceptivité, nous mettent dans la disposition d’esprit la meilleure pour recevoir le chef d’œuvre lui-même. Et les œuvres présentées ensuite qui montrent l’influence du tableau et dont la plupart sont également magnifiques contribuent à ce que l’on reste dans une forme d’enchantement, permettant de revenir ensuite vers le tableau de Vinci avec un regard encore enrichi par ces autres œuvres.
Et puis peut-être est-ce aussi une affaire de jour avec. Il y a des moments où l’on est à priori disponible, d’autres beaucoup moins, où le mental, quoiqu’on voie, quoiqu’on fasse reste encombré d’éléments parasites.
Disons qu’hier il y avait une belle conjonction de la beauté intrinsèque et de l’état du récepteur !
Ce n’est pas si fréquent. Un moment à marquer d’une pierre blanche !

Sainte-Anne restaurée, photo RMN

vendredi 8 juin 2012

Pas facile


Décidément je ne sais pas si je vais parvenir à reprendre vraiment ce blog !
Je voulais parler cinéma, donner quelques réactions et réflexions à propos de certains films vus récemment, donner un peu de chair et d’explicitation à la froide liste que je constitue par ailleurs dans les mémentos.
Mais devant la feuille, l’écran blanc, j’ai du mal. Ça ne vient pas. J’avais des remarques dans la tête pourtant et même des bribes de mots. Mais de là à les organiser et à les coucher sur l’écran, il y a un effort, un travail que je ne parviens pas à faire.
Je ne me force pas.
Bien sûr ça m’embête. Si je reprends un blog il me faut l’alimenter. Je vois les jours passer, une semaine déjà depuis le billet déposé sur mon ancien blog pour dire que je revenais. Mais je l’ai dit aussi, je ne veux pas me donner d’obligation, il faut même que je résiste à toute force à ma tendance à me donner des obligations. J’avais pris plaisir par exemple à écrire un compte rendu de mes journées à Genève, très bien, je ne parviens pas à écrire mes pensées cinématographiques, tant pis, je passe.
Mais il ne faudrait pas que ce blog ne soit que mes tergiversations à propos de faire blog ou pas !
Il sera ce qu’il sera !

Hier j’avais préparé un mail à tout mon vieux carnet d’adresse de blogosphère pour dire que je reprenais, j’hésitais à l’envoyer à cause de mes doutes quant à la reprise, je devrais donc encore plus le mettre à la corbeille après ce billet avorté mais je l’envoie tout de même, ce ne sera pas très motivant pour celles-ceux qui suivront le lien de tomber sur un billet aussi vide mais tant pis, là encore, je file la contradiction…

vendredi 1 juin 2012

Ouverture (suite)


Bon, j’ouvre un peu plus la boutique. Je donne le lien de ce nouveau lieu à mon ancien blogomonde avant, peut-être, de le faire connaître à d’autres.
Il le faut car sinon c’est absurde. Un blog sans lecteur et qui n’est support d’aucune communication n’a pas de sens. Il n s’agit pas d’avoir beaucoup de lecteurs mais d’en avoir au moins quelques-uns, un micro lectorat avec lequel s’effectue un partage. Sinon autant écrire un journal pour soi seul, sur des cahiers au fond d’une armoire ou sur des fichiers dans les profondeurs d’un ordinateur. Mais ce ne serait pas non plus le même contenu et les ratiocinations autour de moi-même ça ne m’intéresse plus.
Mais j’hésitais à cette ouverture publique car, pour l’instant, ce nouveau journal, je ne l’aime pas vraiment. Ni dans sa présentation que je trouve banale, tristounette, mal maîtrisée (les outils de Blogger ne sont pas si souples et faciles à utiliser que ça, je comprends mal en particulier comment se gèrent les tailles de caractères mais je n’ai pas envie de passer des heures à trouver un aspect visuel qui me conviendrait vraiment). Ni dans son fonds, ni dans le fait même de l’écrire ce qui est le plus grave. S’il n’y a pas plaisir je ne m’y acharnerai pas. J’ai certes des poussés d’envie de reprendre et c’est bien pourquoi je suis revenu, mais il y a aussi beaucoup de doutes sur mes envies réelles, il n’y a pas cette fraîcheur, cette excitation, cette jubilation à l’écrire que j’ai pu connaître dans un autre temps du diarisme en ligne.
Bref ce sera peut-être un faux départ, un bébé mort né…
Nous verrons bien…